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Nahla, film de Farouk Beloufa. Trois femmes arabes à la recherche de la liberté dans Beyrouth en guerre des années 1970

                      

J'ai revu pour la énième fois vendredi 02 avril 2010 le film « Nahla » de Farouk Beloufa à l'occasion de sa projection  par le ciné-club « Chrysalide » à la filmathèque « Mohamed Zinet «  (Riadh El Feth, Alger). Chaque nouvelle vision est pour moi une redécouverte car ce film est d'une richesse telle qu'il contient et véhicule d'innombrables significations à chaque fois révélées. De ce point de vue, « Nahla » est, comme l'a affirmé l'animateur de « Chrysalide », l'un des plus grands  films algériens, sinon le plus grand.

La richesse de sens  de « Nahla » provient de son scénario (écrit par le réalisateur avec la collaboration de Rachid Boudjedra, écrivain,  et Mouny Berrah, journaliste) et de sa mise en scène réunis ; elle a pour matériaux le mariage  de plusieurs dimensions de réalités humaines en un ensemble adapté au langage cinématographique:

- réalités politiques, celles du Liban multiconfessionnel pris dans la tourmente moyen-orientale;

- réalités sociales,  celles d'une société ou de sociétés (auxquelles peut être apparentée la société algérienne de l'époque du film comme de l'actuelle, me semble-t-il) où ni les hommes ni, encore moins les femmes, ne sont, a priori, libres de choisir leur vie ;

- réalités psychologiques,  celles où les individus sont confrontés à des conflits intérieurs tels qu'ils ne les résolvent  qu'au prix, soit des plus grands sacrifices, soit des plus graves renoncements.

Les personnages principaux du film sont trois femmes aux choix de vie assez différents :

- Hind, la militante  qui a choisi de consacrer sa vie aux autres –  d'autres qui ne sont même pas encore nés étant convaincue  que son combat ne peut réellement aboutir qu'au bout de plusieurs générations ;

- Maha, la femme libre qui a décidé d'avoir la maîtrise de son existence mais qui a fait l'erreur qui lui colle à la peau de se marier à un homme immature en mal de maternage ;

- Nahla, la femme - enfant qui nourrit l'ambition de devenir une grande chanteuse mais qui par, fragilité ou peur des épreuves prévisibles, s'abandonne lamentablement au confort facile offert par un milliardaire attiré moins par sa beauté extérieur et intérieur que par  un trophée à ajouter son palmarès.

Le quatrième personnage principal, Larbi, le reporter algérien, est un  témoin  impliqué (ou engagé) de la vie des personnages et des événements qu'ils traversent et, implicitement, une représentation du réalisateur lui-même.

C'est là un film unique en son genre  dans le cinéma algérien tant par sa thématique – les temps faussement calmes qui précèdent la tempête de la guerre civile,  le lieu de l'histoire et du tournage  - Beyrouth de  1977 ravagée par la guerre,  ses personnages – trois destins de femmes arabes, l'usage fait de la caméra - sa mobilité travaille au corps les personnages – sa durée -  trois heures dans sa version longue que rares sont les réalisateurs dans le monde entier à avoir osé pratiquer.

La dimension de monument du septième art en Algérie donnée par beaucoup de cinéphiles à "Nahla" a fait dire récemment  à Farouk Beloufa, qui n'a pas réalisé d'autre film par la suite,   qu'il  a tout  dit dans cette seule création. En somme, Un chef d'œuvre unique dans tous les sens du terme.



12/12/2011
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